Nouveau Noum [Saint Octobre]

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Rétrospective poétique de l’activité nucléaire soviétique puis russe en zone Arctique entre 1955 et 2016.

Ouvrage collectif : livre + film musical

Saint Octobre, Cinéma Fragile, Anne Bouillot, Clément Payot.

traductions anglaises : Nathalie Merlier

poésie électro / cinéma / photographie / graphisme

Éditions La Passe du Vent – 2016

Saint Octobre - Nouveau Noum

Forme poétique nouvelle combinant texte, cinéma, photographie, graphisme et documentation artistique et scientifique, Nouveau Noum est porté par le groupe de poésie électro Saint Octobre (Jean-Baptiste Cabaud, texte ; David Champey, musique), les réalisateur de films Cinéma Fragile, Anne Bouillot, photographie et Clément Payot, graphisme.

Nouveau Noum – à la fois livre, film et exposition – est une rétrospective poétique de l’activité nucléaire soviétique puis russe en zone Arctique entre 1955 et 2016. Cette poésie conçue à douze mains prend ici simultanément et indissociablement une forme écrite, sonore, visuelle animée, visuelle statique et graphique et retrace point par point les évènements historiques marquants de cette activité au cours des 60 dernières années : évacuation de l’archipel de Nouvelle-Zemble, mise en service du brise-glace Lénine, explosion de Tsar Bomba, construction de la centrale nucléaire de Kola, etc. Le livre donne accès gratuitement sur internet au film musical Nouveau Noum réalisé par Cinéma Fragile sur la musique de Saint Octobre

L’ouvrage reprend en plus d’une iconographie historique soignée, une large part des photos d’Anne Bouillot réalisées en résidence de création à Berlin et en ex-Allemagne de l’Est en 2013 avec Saint Octobre. Ce travail photographique d’une poésie troublante, dont l’esthétisme a été poussé à outrance dans des lieux à la mémoire et à l’histoire forte donne un livre présentant un univers militaro-nucléaire d’une étrange intensité, onirique et irréel, à l’esthétique puissante et baroque, hors du temps.

Le livre sur le site de l’éditeur, ici.

Extrait :

1955 — Novaïa Zemlia — Ouste les Nénètses — Nouveau Noum

C’est cinq cent kilomètres de vie essoufflée, ici. Au large du Nord de tout. Cinq cent kilomètres désertés, de froid et de silence, noyés de Barentz et de Kara dans l’obscurité semi-annuelle immense d’un ciel laiteux. D’un ciel invisible et sans importance.

C’est, ici —ᅠgéographiquement en bas — Loujny, île toundra aux rives en neige de roche blanche. Pergélisol aux rivières sans sources; des éléphants monstrueux, à leur longue surprise, moururent là, noyés dans de la terre. Ses rassemblements liquides hasardeux suivent la pente naturelle d’un sol mille fois humide s’échouant dans des mers le plus souvent gelées.

Et puis

c’est, franchi le Matotchkine, Severny, là. L’autre. Celle du Nord. Celle dont le nom signifie Nord; celle sans autre besoin de nom que sa propre localisation. Vraie fille de l’Oural, Severny. île des montagnes et des hauteurs de glace, des vents balayant sifflant pour rien, de la solitude. île des brouillards givrés noyant la mer, les expéditions et le courage des hommes.

Mais

c’est cinq cent kilomètres d’absence, ici : Novaïa Zemlia, archipel vidé. Tus, les hymnes cdes Nénètses, princes itinérants de la toundra — ici, avant, pendant les siècles résidant — chantant Noum, dieu du ciel et des grandes tempêtes, peuples marcheurs du froid, au cul de leurs troupeaux de rennes. Priés d’aller prier sous d’autres cieux, les nomades animistes. Car dès lors religion fut mécanisée — temples nouveaux se construisirent sur l’herbe rase fouettée. Ignifuges, de béton et pare-feux. Et nouveaux chamans vinrent, portant rang de colonels. Noum, soviétisé, renforça son pouvoir à l’abri des regards du monde. Pour le test et l’essai, étendit ses colères de foudre toujours plus au large. Toujours plus haut sous le plafond de la nuit. Vers le fond des eaux. Jusqu’au creux des terres. Nouveau Noum, changeant d’adorateurs, ne déclencha plus que sur prière militaire ses tempêtes radionucléides, ses vents isotopes. À coup de mégatonnes souffla le césium et le strontium qui dérivèrent, pauvres éléments chimiques abandonnés, au gré des cieux.

Trouvèrent refuge souvent dans les terres et les eaux de Kola.

Nouveau Noum Saint Octobre Extrait 1

Nouveau Noum Saint Octobre Extrait 2

Nouveau Noum Saint Octobre Extrait 3

Nouveau Noum Saint Octobre Extrait 4

Copyright photos : www.AnneBouillot.com

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